Le jugement

Avez-vous pris le temps d'observer ce que dit votre tête ? Si vous ne l'avez pas fait, attardez-vous sur les pensées qui vous viennent. Vous remarquerez sans doute que votre tête passe son temps à juger.

Elle aime telle personne, mais pas telle autre. Elle pense qu'il fait vraiment moche aujourd'hui, que la robe de la voisine lui va mal, que cet aliment est bon, mais pas tel autre, qu'untel a raison ou tort, qu'on serait mieux ailleurs, que les responsables ne font pas ce qu'il faut, que les gens n'écoutent pas ce qu'on leur dit. Bref, votre tête passe son temps à juger.

Juger du temps, des choses, des couleurs, des gens, des actes, des situations, de soi-même et surtout des autres. Des jugements parfois favorables, mais souvent critiques.

Le jugement sépare le monde en deux, de façon catégorique. D'un côté il y a ce qu'il faut, ce qui est bon, juste, naturel, beau, souhaitable, etc., et de l'autre ce qui est injuste, moche, mauvais, détestable.

Cet avis tranché offre la facilité de ne pas se poser trop de questions sur le monde qui nous entoure. D'une manière expéditive, nous posons une étiquette et la chose est classée. Nous sommes assez malin pour savoir séparer le bon du mauvais.

Sauf que le monde est infiniment plus complexe, riche et étonnant que voudrait nous le faire croire notre tête. Nous sommes comme ces enfants qui ont décrété qu'ils n'aimaient pas tel plat sans même y avoir goûté. Parce que nous l'avons décrété à priori, nous nous privons d'habits qui nous rendraient plus élégants, de rencontres qui nous enrichiraient, de paysages qui nous combleraient. Nous nous fermons au monde.

Le jugement tue la curiosité et l'émerveillement, le pouvoir d'aller vers l'autre et de se surprendre à apprécier quelque chose que l'on croyait détester. Il nous emprisonne et bien souvent nous aigrit.